Il aura fallu un livre pour me redonner l'envie de poster par ici, longuement, tranquillement.
L'occasion d'un après-midi finalement plus calme que prévu, avec 3 rendez-vous médicaux différents dans trois lieux différents, mais tout s'étant bien goupillé, un petit break pour finir mon livre et un moment délibérément volé pour en parler, pour parler tout court d'ailleurs.
Parler pour ne rien dire de spécial, pourquoi pas après-tout ! Qui m'aime me lise ... ou pas ...
Pffffffiouuuuuu, quel livre donc, drôlement longtemps que, malgré mes nombreuses lectures dont je ne prenais plus le temps de vous parler non plus, drôlement longtemps que je n'avais pas été à ce point terrassée et habitée par un livre.
J'en ai lu récemment des chouettes, des forts, des drôles, des farfelus. De Cet été là de Véronique Olmi, à mi-chemin entre un livre d'Olivier Adam et Les petits mouchoirs de Guillaume Canet, ou encore l'histoire du Vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire de Jonas Jonasson, récit loufoque à la Paaslinna et chronique d'un siècle encore plus fou, ou enfin le bouleversant roman de Kathryn Stockett, La couleur des sentiments, d'une humanité et d'une émotion rares.
Mais là ... Comment dire ... On est un cran au-dessus. On ne sait pas pourquoi, comment, mais on le sent, on le sait, on est face à quelque chose, un de ces livres qui laisse une trace indélébile. Un de ces livres auxquels on croit, un de ces personnages dont on ne doute pas un seul instant de l'existence vraie, parce que c'est pas possible autrement. Parce que l'imagination d'un homme ne peut pas inventer pareil récit avec pareil talent. Ou plutôt si, elle le peut, et ça, ça terrasse un lecteur ! Se dire qu'on peut être capable de sortir une telle histoire de ses tripes, de ses méninges, ça me rend malade de jalousie et de bonheur à la fois !
"La ballade de gueule-tranchée" ... Rien que ça, quel titre non ? On sait qu'on va partir dès les premiers mots, on y est déjà ... Qui c'est ce bonhomme, ce "gueule-tranchée", et elle a quoi sa gueule de si extraordinaire ? Et on sait bien que ça sera pas juste une ballade, ça sera pas une simple partie de plaisir, non, on le sent bien, qu'on va s'en prendre plein la gueule, tranchée ou pas !
C'est toute sa vie qui défile sous nos yeux, et s'incruste dans nos pores comme une sale odeur, une odeur de vie et de mort, une odeur d'amour et de violence, doucereuse et nauséabonde à la fois.
Ce gamin que sa mère maudit et jette à l'eau, repéché par une bonne âme et élevé avec des leçons de vie qui sauvent autant qu'elles bouleversent. Ce pauvre diable qui s'en prend plein la tronche autant qu'il dérouille les autres, mais pas trop quand même, juste ceux qui vraiment vraiment l'ont mérité ... Ce personnage picaresque (?), romanesque (?), si vrai en tous cas. On a l'impression d'assister au lent développement d'une photo aux multiples détails, d'une histoire qu'on scrute à la loupe, et qui pourtant semble se dérouler le pied sur le champignon, irrésistible, une destinée impossible à détourner, à éviter. Un buldozer de vie et de fatalité, jamais geignard, jamais larmoyant, toujours terriblement acéré.
Ce gamin donc, qui va grandir, en cachant sa trogne qui pue, des dents pourries qui lui pourrissent la vie, et qui fondent sa détermination en même temps. Un mauvais sort que Gueule-tranchée fait sien. Et il grandit, traverse le siècle, le 20ème, dans une région riche et hostile à la fois. En traversant le siècle, il croise conflits et bouleversements sociaux, culturels, politiques. Il accumule crimes et amours. Il apprend le poids, le pouvoir et l'inanité des mots, des écrits.
Et ce faisant, il nous en apprend long aussi, il ne nous apprend rien et il nous apprend tout.
Bon, allez, si ça se trouve, dans 15 jours, je l'aurai oublié ce livre ... Ou pas ... Non, peut-être pas ... Sûrement pas ...
On verra !
Et sinon, comment va ?
Là, je devrais commencer un nouvel article, mais pas envie, c'est la vie, la mienne, qui utilise les mots pour mêler le réel et la fiction. Rapido ou en détail ? Pfffffff, la flemme revient bizarrement, est-ce qu'une vie, nouvelle ou pas, peut se résumer en quelques lignes télégraphiques façon "j'te donne de mes nouvelles parce que j'ai mauvaise conscience de ne plus prendre le temps d'en donner" ?
Globalement, ça va bien pour nous : on continue nos galères assuranço-judiciaires, c'est long, trop long, et on se sent englués, prisonniers, obligés de nous maintenir dans une vigilance agressive pour être sûrs de ne pas nous faire entourlouper. C'est pénible et en même temps tellement anodin au regard des drames que beaucoup traversent, y compris dans notre entourage. Un peu de légèreté ne nuirait pas donc, mais si parfois ça semble évident, c'est plus difficile certains jours sombres et fatigués, se battre encore et encore, pour faire comprendre que "non, c'est pas juste" !
Les enfants sont en forme, Miss Apolline continue de cogiter sévère sur le fait qu'elle a frôlé la mort en compagnie de son papa et de sa petite soeur, mais on est désormais aidés dans ce long cheminement interne qui doit la mener à une cicatrisation, avec cicatrice donc, mais moins de douleur ou de violence. Isaure grandit, change, surprend, fatigue, réjouit, pleine de vie et de détermination et de tête de pioche ! Théophane est dans un entre-deux, encore très dans l'enfance, mais on sent bien que bientôt, une page va se tourner, paisiblement pour le moment. C'est beau et chouette et joyeux et étrange de sentir venir cette transformation. Amélien est lui aussi dans une période où il doit choisir entre le monde de la petite enfance, celui de sa petite soeur, et celui d'une certaine autonomie. Il hésite encore, va et vient, avec de moins en moins de colère ou de frustration, avec plus de compréhension visiblement, moins de craintes peut-être, sur ce qu'il pourrait y perdre ou y gagner. Je suis tous ces changements avec intérêt et surprise et émerveillement et désappointement. C'est très étrange.
Et les parents ? Compliqué et simple à la fois. La recherche d'emploi dans notre nouvelle région nous a réservé une drôle de surprise, puisque que c'est finalement Supermama qui a trouvé, presque par hasard, presque sans le vouloir, un poste dans ses cordes, même si pas du tout adapté à une vie épanouie de maman de 4 enfants. Du coup, c'est le papa qui, après avoir enfin quitté la région parisienne, assure (quand il le veut bien) une partie de l'intendance domestique au quotidien.
Là encore, drôle de sentiment ambigü, avec la joie de le voir cesser ces fichus allers-et-retours, et le crève-coeur pour moi de quitter cet "hors-du-temps" professionnel qui me convenait drôlement, que je n'étais pas prête du tout à abandonner si vite, si tôt.
Notre maison et notre jardin et notre vie continuent de se transformer, de s'embellir, s'enrichissant mutuellement, nous ravissant même si la fatigue se fait souvent sentir. On est quand même tellement souvent dans la satisfaction et la récolte des fruits semés que c'est bon à vivre, tout ça ...
Prendrais-je le temps de vous en dire et montrer plus, en détail ?
Qui vivra verra ...
Sourire réjoui et paisible vers vous tous !